• Chimère.

    Après une nuit sans sommeil

    Sous les premiers rayons du soleil,

    La rivière s’enfume

    D’un léger voile de brume.

    Des rochers au crâne noir

    Rongés de désespoir,

    Coiffés d’une mousse d’écume

    Dans le courant s’enrhument.

    Apportée par le vent

    Il y a plus de cent ans,

    Ils murmurent cette histoire

    A ceux qui veulent les croire.

    Dans le ventre de la rivière

    Habite une nymphe aux yeux verts

    Qui dévore les hommes

    Si de sa couleur ils s’étonnent.

    Sur une plage de sable,

    Semée de galets blancs,

    Qui semble bien aimable

    Au soleil levant ;

    Au pied d’un arbre mort,

    Je la surprends, elle dort

    Étendue sur le flanc.

    Je m’approche hésitant.

    Elle a pour toute parure

    Une longue chevelure

    Qui sous la brise s’éveille

    Et flamboie au soleil,

    Habille de cuivre et d’or

    Un magnifique corps,

    Aux lignes pures,

    Lascif et sensuel,

    Fruit sublime de la nature.

    Sa peau couleur bleu ciel

    Plutôt que me surprendre

    En tout point m’émerveille.

    Mon cœur se fait tendre,

    J’ai peur qu’elle ne s’éveille ;

    J’aimerais la toucher

    Tout au moins l’effleurer ;

    Ma timidité

    Me fait hésiter.

    Elle ouvre les yeux,

    Ils scintillent de mille feux

    Ce sont ceux d’un félin

    En quête d’un festin.

    Son regard émeraude

    Semble être en maraude.

    Elle me fixe intensément ;

    Je suis sous hypnose ;

    Dans ce bref instant,

    Bouger, je n’ose.

    Elle sourit gentiment

    Quel délicieux moment.

    Dans sa bouche divine

    Soudain, je devine

    Quatre énormes canines ;

    Faut-il que je dessine

    Les desseins de la belle.

    Cela est-il réel ? 

    Tout à coup, elle bondit,   

    De frayeur je crie,

     

    M’enserre dans ses bras,

    Me bloque entre ses cuisses ;

    Je m’abandonne sans combat,

    Crains un terrible supplice,

    Vois l’instant de ma mort ;

    Mon épaule, elle mord

    Avec grand délice ;

    Je deviens complice,

    Ne fait pas d’effort,

    Ni ne me débat,

    Me satisfait de mon sort,

    Accepte les ébats.

    Sur un lit de mousse,

    Je caresse sa peau douce

    Dont la chaleur

    Excite mes ardeurs ;

    Sans aucun remord,

    Je sens dans mon corps

    Grandir mon émoi ;

    Elle attend de moi

    Beaucoup de bonheur

    Je le lis dans son cœur.

    Au moment le plus fort

    Je pénètre son corps ;

    En symbiose totale,

    Cette étreinte peu banale,

    Fruit d’un heureux hasard

    A quelque chose d’animal.

    Je perçois dans son regard

    Une âme pure,

    Incapable de parjure.

    De jolis papillons verts

    S’envolent de ses paupières.

    Nous restons quelque peu

    A nous regarder,

    Nous épier,

    Surprendre nos pensées,

    En cet instant insensé.

    Soudain, au fond de ses yeux,

    Un orage d’éclairs verts

    Explose jusqu’aux cieux,

    Une pluie douce et légère

    M’inonde de son soleil ;

    Je l’accompagne d’un rai de lumière

    Qui m’emporte jusqu’au ciel.

    Epuisés, repus et fier,

    Nos deux corps

    A la frontière de la mort

    Se reposent enlacés ;

    Puis lassée,

    Elle me repousse,

    Se dresse sur la mousse

    Et disparaît dans l’onde pure.

    Aujourd’hui, les rochers murmurent

    La naissance future

    D’une fille de la nature.

    Une princesse à peau bleue

    Régnant sur les cieux.

    Ou est tu Chimère d’antan

    Evanescente allégorie d’adolescent.

     

    Chimère.

    « L’appel de la rivière.A mon père. »

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